Conceptuellement juste, opérationnellement faux

Le titre quelque peu barbare de cette chronique cache en fait une réalité qui concerne une certaine partie, pour ne pas dire un certain nombre d’entreprises : le concept est correct, mais sa mise en place ou sa commercialisation est « hors sol ».

Attardons-nous aux concepts qui ont atteint une certaine maturité intellectuelle, mais qui ne « décollent » pas sur le plan opérationnel ou commercial. Les raisons peuvent être multiples, néanmoins certaines constantes semblent émerger :

• L’approche relève du fantasme ou de l’imaginaire sans un mise à l’épreuve technique.

• Le produit est trop complexe pour une utilisation rationnelle par un public « lambda ».

• Le rapport qualité-prix n’est pas adapté pour un marché précis dans lequel la concurrence dispose d’un produit plus attractif.

• L’acheteur ne bénéficie d’aucune liberté d’action, étant captif du fournisseur à cause d’un « savant » concept de rétention.

Certains « problèmes » de ce type se retrouvent également dans le secteur tertiaire où l’on constate que les processus et flux sont corrects mais totalement rédhibitoires.

La vision et l’approche de plus en plus « anglo-saxonne » et la judiciarisation du monde des affaires poussent les entreprises à mettre la gestion des risques et la conformité des opérations avant l’opérationnel, ce qui a des coûts énormes et pour conséquence d’éviter de faire certaines opérations. On constate ainsi que les processus et flux sont corrects « en droit » mais totalement rédhibitoires sur le plan pratique.

Dans un marché officiel (nous ne parlons pas des marchés gris, opaques ou parallèles), plus personne ne conteste aujourd’hui le besoin d’être en conformité (« compliant »), de respecter les normes, d’éviter les gros risques, qu’ils soient liés à la branche ou édictés par les autorités. Ainsi, les normes ont apporté une forme d’harmonisation dans les concepts et les processus, évitant de cuisants échecs pour les entreprises.

Néanmoins, faire conceptuellement juste n’apporte ni le succès, ni une garantie d’être efficient opérationnellement. A titre d’exemples, certaines normes (DIN, ISO, etc.) permettent de disposer de processus « certifiés » mais pas forcément efficients sur le plan comptable. Si le seul fait de respecter toutes les certifications permettait d’augmenter le chiffre d’affaires, voire les bénéfices, se saurait depuis longtemps. Ainsi, on peut en conclure que le concept sert de base à l’opérationnel mais ne le résout pas…

Certains biais opérationnels peuvent engendrer exactement le contraire de ce qui est recherché. Citons la participation comme nouvel exemple de « concept ». Impliquer un maximum de personnes dans l’élaboration d’un processus peut être stimulant et très productif. A l’inverse, le processus de décision et d’exécution doit être le plus direct possible et restreint à un petit nombre.

Les normes environnementales constituent un dernier exemple parlant : lorsqu’une mesure devient punitive, donc non incitative, ou qu’un processus écologique complexifie fortement le travail au quotidien, il est à parier que la très grande majorité des personnes concernées veuille rapidement trouver, à tort ou à raison, des palliatifs.

Les entreprises qui ont du succès sur le long terme travaillent dans une forme de dualité faisant des compromis un atout, du pragmatisme un allié. Ceci me rappelle les propos d’un de mes professeurs qu’il relevait connaître beaucoup de personnes très instruites, mais pas forcément intelligentes. C’est peut-être aussi cela la différence entre le conceptuel et l’opérationnel.

Bonne lecture et à bientôt.

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