Pourquoi certains pays et entreprises s’en sortent mieux que d’autres économiquement et opérationnellement alors que leurs fondamentaux sont pratiquement les mêmes ?
Il existe, bien évidemment, toute une série de paramètres et de facteurs qui jouent un rôle mais un semble particulièrement intéressant à observer : la sur-ingénierie.
Par culture ou par essence, certains pays ou grands groupes développent des systèmes, des processus, des organisations complexes qui deviennent des structures quasi autoportantes. Que veut-on dire par cela ?
Dans un pays de PME comme la Suisse, l’efficacité et la simplicité, le fait d’aller à l’essentiel de manière pragmatique et souple sont des valeurs cardinales. Encore faut-il que le cadre législatif et réglementaire le permette, ce qui est bien souvent le cas en comparaison internationale. On pourrait résumer cette approche par le fameux « keep it simple ».
A titre de contre-exemple, il est intéressant d’observer nos voisins et amis français qui excellent souvent dans l’art et la manière de compliquer au maximum les approches, les lois, les strates, les instances de décisions : en d’autres termes, pourquoi faire simple quand on peut compliquer…
Il y a bien naturellement un historique et un modèle de société qui diffère totalement du système suisse : la centralisation à outrance, le système académique limitant les chances pour un cadre d’accéder aux plus hautes sphères s’il/elle n’a pas suivi les grandes écoles, les strates politiques rendant la lisibilité et la prévisibilité des actions locales très difficiles, la répartition des compétences rendant les maires des villes totalement dépendants des décisions prises à Paris, etc.
Ceci se retrouve souvent au niveau des entreprises qui ont tendance à faire de la sur-ingénierie pour toute action alors que dans bien des cas, il suffirait de prendre une simple décision au bon moment et d’exécuter pour avoir un résultat bien meilleur. Que l’on ne s’y méprenne pas : l’ingénierie est essentielle dans bien des domaines et grâce à elle, de nombreuses activités peuvent être conduites avec succès.
En revanche, il devient navrant pour ne pas dire frustrant, de vouloir schématiser et détailler certains processus ou flux à un niveau de détail que plus personne ne comprend : c’est de l’art pour l’art. Pour une PME, ce « luxe » n’est pas permis.
Ayant eu le « privilège » durant les études d’écrire des processus à « l’utilité relative » qui consistait, par exemple, à décrire les actions entourant l’achat d’une baguette de pain en 40 étapes, le soussigné a depuis des doutes sur certaines méthodes…
Là également, il ne s’agit pas de « jeter le bébé avec l’eau du bain » mais bien d’évaluer si la sur-documentation, les triples vérifications, les quatre couches décisionnelles sont bien utiles. Dans la plupart des cas, la réponse est claire : c’est non.
Le mal est pernicieux. Sous prétexte d’audits, de conformité, de volonté d’expliquer, on engage des experts dans tous les domaines, experts qui se perdent en conjectures et en explications « hors sol » pour traiter des dossiers, sommes toutes, fort simples.
Il est à espérer que les patrons des entreprises, au moins en Suisse, continuent à combiner adroitement les forces et apports de chacun, simples employés ou experts, afin que le résultat d’ensemble soit le plus efficient possible. Pour certains pays qui nous entourent, le chemin pourrait être long, pour autant qu’ils y aspirent…
Bonne semaine, bonnes réflexions et à bientôt.