La qualité d’un leader ne se mesure malheureusement pas à la quantité des cours, séminaires ou autres formations suivis au cours de sa carrière. A fortiori, cela s’applique aussi aux nombreux managers qui gravitent – le terme est volontairement provocateur – dans les entreprises.
La plupart des entreprises commettent régulièrement deux erreurs majeures dans le choix de leurs dirigeants : choisir la ou le plus diplômé(e) et/ou la ou le plus compétent(e) dans son domaine pour la ou le « parachuter » chef(fe) d’une entité. C’est confondre qualité technique et qualité managériale.
En fait, ce sont des métiers totalement différents qui demandent des qualités ne faisant pas appel aux mêmes compétences. Si le manager technique est essentiel aux rouages de l’entreprise et représente souvent « LA » ou « LE » spécialiste de référence, il ne faut (presque) jamais lui confier une responsabilité de conduite : c’est courir à la catastrophe pour la personne concernée et pour l’entourage.
Avoir du leadership, avoir ce flair, cette compréhension et cette sensibilité fine du fonctionnement d’une entreprise, savoir déléguer subtilement, naviguer tactiquement et politiquement dans un environnement souvent chaotique peut s’apprendre en partie dans des écoles de management, mais c’est souvent la personnalité profonde du leader qui la, ou le désigne comme tel(le). On ne se désigne pas leader d’ailleurs…
Durant ma (très) longue carrière, j’ai eu la chance de rencontrer des milliers de managers plus ou moins bons, mais peu de leaders d’exceptions. A quoi cela est-il dû ?
Tout d’abord, soyons honnêtes : les managers sont souvent « victimes » de certains choix d’entreprise – dont leurs nominations – qui optent pour la facilité ou par choix politiques. Les managers sont néanmoins co-responsables, car dans beaucoup de cas, elles ou ils sont conscients(es) de ne pas être à la hauteur, mais ne veulent pas refuser pour de multiples raisons (peur d’être exclu, aspects financiers, égo, etc.).
Le véritable leadership fait souvent peur à certains dirigeants car le leader n’agit pas selon les standards de l’entreprise, mais souvent avec des références moins tangibles, donc moins maîtrisables pour la majorité. La ou le leader est capable d’intégrer une très grande quantité de paramètres dans la réflexion et donc « édulcorer ».
Il est donc plus facile d’avoir des managers serviles dans une entreprise que des leaders indépendants et libres. Il s’agit naturellement de différencier le niveau organisationnel dont on parle : estimer que des leaders sont nécessaires dans toutes les strates de l’entreprise, c’est aller un peu vite en besogne…
Les écoles de management – il n’est pas fait mention, à raison, d’écoles de leadership - font un excellent travail de réflexions, mènent des études sérieuses et intéressantes dans ces domaines. La problématique se trouve à un autre niveau : à ma connaissance, aucune institution n’a pouvoir de décision lors de la sélection d’un candidat à un poste clé de l’entreprise aux termes des séminaires organisés : c’est dû au « business model » mais surtout, aucunes ne veulent assumer de responsabilités…
Enfin, la gouvernance mise en place dans les entreprises constitue le dernier frein à la mise en place d’un véritable leadership : les champs de compétences deviennent de plus en plus réduits selon un modèle anglo-saxon diluant les responsabilités, masquant les enjeux réels derrière des présentations alambiquées, etc. Il ne s’agit pas ici de critiquer un modèle, mais bien d’être conscient que sa mise en place à un coût : celui du leadership ! . Bonne semaine, bonnes réflexions et à bientôt.